lundi 3 septembre 2012

LA VERITE SUR L'EMPLOI EN FRANCE

Michel Sapin, le ministre du Travail a annoncé que la barre des 3 millions de chômeurs a été franchie cet été. Le gouvernement est sous pression. Pourtant, il y du travail en France, mais de trop nombreux métiers restent ignorés...

Il monte, il monte le taux de chômage… Avec son lot d’inquiétudes. Chaque jour, de nouveaux chiffres alarmants, et l’annonce de nouveaux plans de licenciement, chanson triste et lancinante d’un pays en déclin au cœur d’une Europe en perte de vitesse. Certains réclament les interdictions de licenciements, d'autres de nouveaux contrats aidés, et d'autres encore placent le débat essentiellement sur le coût du travail.

Et pourtant…Il y a du travail en France ! Oui, vous avez bien lu. Le nombre d’emplois non pourvus oscille structurellement entre 300 000 et 500 000 (pour 3 millions de chômeurs). C’est presque un scoop tant cette réalité semble ignorée. Informaticiens, comptables, commerciaux, infirmier(e)s, soudeurs, maçons, tourneurs, chauffeurs poids-lourds, techniciens de maintenance… Souriez, vous êtes activement recherchés ! Problème :il semble que vous n’existiez pas... Ou alors vous êtes si peu ! En effet, dans le BTP, l’informatique, l’aéronautique, le domaine médical, les métiers industriels de pointe, on peine à vous trouver et l’on se tourne vers l’étranger pour recruter. Pendant ce temps, le nombre de demandeurs d’emploi augmente. Un paradoxe au goût amer… qui révèle que l’un des principaux enjeux de l’emploi dans notre pays réside aujourd’hui dans l'adéquation entre offre et demande, et donc dans la formation, condition de la compétence.

Nous n’avons pas su anticiper, il y a dix ans, les besoins présents des entreprises. Nous avons pêché par manque de vision. L’enquête annuelle de Pôle Emploi sur les besoins de main d’œuvre de l’économie française révèle ainsi que 43% des projets de recrutement n’aboutissent pas en 2012, ce principalement en raison de l’inadéquation persistante entre offre et demande. Une récente étude du McKinsey Global Institute pointe du doigt que, faute d'actions, il pourrait manquer à la France 2,2 millions d'emplois en tension, alors que 2,3 millions de français seraient sans emploi, faute de qualification, ou en tout cas de qualification en phase avec les besoins du marché. Avec un taux de chômage des jeunes qui atteint des taux record, rares sont ceux qui pointent du doigt la cause profonde de ce mal: notre système éducatif ! Ce dernier fournit chaque année des cohortes de chômeurs en puissance: des bac +5 en communication, sociologie, psychologie... qui doivent se résigner après des mois de recherches infructueuses à accepter des postes non qualifiés... Il est impératif d'ouvrir le système éducatif au monde de l'entreprise.

La formation, celle des étudiants et des professionnels, est donc la solution pour lutter contre le chômage. Mais, au-delà, pour réussir pleinement et durablement, nous devons aussi changer notre état d’esprit.

D’abord celui qui consiste à ternir l’image de certains métiers, voire de secteurs entiers, en raison de leur pénibilité ou de leur dangerosité, à l’origine d’une crise des vocations et de la pénurie actuelle. Il en va ainsi de l'industrie, du BTP, de la restauration, ou encore des carrières hospitalières. De nombreux jeunes sont plus soucieux de leurs sacro-saintes RTT que de l'intérêt du travail. Plus personne, en clair, ne veut mettre ses mains dans le cambouis… J’y vois le symptôme d’une France malade de son opulence et de son confort. Il fut un temps, celui des Trente Glorieuses par exemple, où avoir un travail suffisait au bonheur, où l’on ne craignait pas de se retrousser les manches.

Autre facteur bloquant, notre réticence, bien française, à la mobilité. De nombreux Français sont en effet très attachés à leur région et leur patrimoine. C’est tout à leur honneur. Néanmoins, un emploi, quand on en cherche un, ne se refuse pas au motif qu’il est localisé dans une autre région et impliquerait un déménagement ou un temps de trajet plus important. En changeant régulièrement d’État pour répondre à l’offre, les Américains sont sans doute l’exemple à suivre en la matière.

Quant aux recruteurs, acteurs-clés, ils doivent eux aussi, en retour, faire preuve de plus de souplesse et savoir transiger sur certains points. Accepter, par exemple, d’étudier plus avant le cas d’un parcours atypique, valoriser la prise de risque d’un candidat ayant fait le choix d’une mobilité sectorielle ou géographique, ou encore d’une aventure entrepreneuriale finalement non concluante. Car l’échec, s’il est compris et digéré, est une source d’expérience précieuse de même que la capacité à prendre des risques est une qualité dans la vie professionnelle.

Enfin… Soyons optimistes ! L’optimisme est un facteur favorable en économie, à même d’alimenter un processus vertueux. Une étude du William Davidson Institute de l’Université du Michigan menée en 2008 ainsi révélé que les créateurs d’entreprise optimistes performaient mieux que les pessimistes en termes de bénéfices réalisés, la palme des meilleurs résultats allant à la catégorie des « optimistes-réalistes ». Faut-il rappeler, en ces temps de rigueur budgétaire, qu’être optimiste ne coûte rien ?…

Travail, courage, mobilité, flexibilité, optimisme… Voici les caractères et valeurs sur lesquels les nations forgent leur réussite. Dans un monde qui voit se finir irrémédiablement, au moins sur le plan économique, le leadership européen, nous devons nous adapter ou mourir.

Voilà la vérité.

Alexandre Pham est président de Lynx RH, réseau de recrutement temporaire et permanent.